Changer de cap

SUR LE BLOG

De l'utilisation des algorithmes dans les politiques de contrôle

algorithmes de la CAF

Le groupe en charge des questions numériques au sein du collectif répond aux arguments de la CNAF sur les contrôles et l’algorithme de notation des allocataires.

A lire ici

Né en janvier 2019, le collectif Changer de Cap a pour objectif de favoriser la convergence entre les revendications sociales et écologiques, la défense du service public, la recherche d’une démocratie réelle, qui toutes mettent en lumière une même nécessité de changer le système.

Il constitue aujourd’hui une plate-forme d’appui et de mise en réseau pour les collectifs citoyens et autres acteurs locaux, en mutualisant les actions porteuses d’alternatives, les informations, les luttes et les réflexions.

Des actions porteuses d’alternatives

Démocratie réelle dans les territoires

Une vingtaine d’exemples de démocratie directe et de participation des citoyens dans la durée (sur 10 ans, 20 ans, 30 ans…), qui disent comment des collectifs locaux ont pu développer des logiques de projets partagés et agir ensemble au quotidien pour promouvoir l’écologie et la solidarité, construire une démocratie réelle.

Ces exemples, malgré leur diversité, montrent qu’il est possible de maintenir la mobilisation d’une partie importante de la population dans la durée sur de tels objectifs à travers une attitude d’écoute et une confiance réciproque, la co-construction des projets, une diversité d’outils participatifs (conseils participatifs, groupes projets, rencontres, etc.), la participation de tous aux moments clés, une information permanente, etc., sans oublier la fête et la fraternité.

Chantiers du collectif

Justice sociale et fiscale, égalité

Plan d’urgence pour les précaires

Garantir un emploi à tous, revoir la hiérarchie des métiers

Egalité entre les femmes et les hommes

Écarts de salaires, fiscalité des entreprises, taxation des patrimoines

une nouvelle politique migratoire

Contrôler le crédit, la dette, l’investissement

Création monétaire par la BCE ou souveraineté monétaire ?

Mettre le crédit au service de la reconstruction écologique

remettre en cause le libre-échange

Restaurer les équilibres écologiques

Sortir du productivisme, réorienter l’économie vers les Communs

Rendre les entreprises responsables des conséquences de leur action

Une planification écologique, sociale, démocratique

Relocaliser, reconquérir l’autonomie

Un aménagement du territoire équilibré, un urbanisme en archipel

Développer l’agriculture paysanne, une alimentation de qualité pour tou.tes

Refonder la démocratie, transformer les institutions

Une constituante pour une VIe République

Développer la démocratie directe

Reconstruire un État régulateur et opérateur

Repenser la décentralisation et la déconcentration

Restaurer l’état de droit, y compris numérique

Libérer la culture et les médias des puissances d’argent

Reconstruire les services publics comme des Communs

Reconstruire les services publics et la fonction publique

Une éducation émancipatrice à tous les âges de la vie

Faire de la recherche publique une priorité

Reconstruire la santé comme un Commun

une sécurité sociale pour le XXIe siècle

Principes et valeurs d’une société solidaire et émancipatrice

Partage et responsabilité dans l’organisation collective

Restaurer la confiance, l’honnêteté et la dignité

Sobriété, autonomie, nouvel art de vivre

Un autre rapport à la nature et au vivant

Agir au niveau européen et mondial

Dès maintenant, amorcer une rupture avec la ligne ordolibérale

Reconstruire une Europe solidaire et responsable

Un nouvel ordre mondial, des droits humains universels

Des communs mondiaux pour répondre aux enjeux climatiques et sociaux

Refonder l’ONU et la doter de moyens d’agir

Appel

Six changements d’orientation majeurs sont nécessaires pour remettre l'humain et le droit au cœur de l'action des CAF

Les Caisses d’Allocations Familiales (CAF) ont pour mission d’être au service des allocataires, comme le veut l’article L583-1 du Code de la Sécurité sociale, et sont aujourd’hui des acteurs essentiels des politiques de solidarité. Or nous constatons chaque jour, à travers nos pratiques, les difficultés grandissantes des allocataires pour faire valoir leurs droits et les conséquences délétères d’une gestion tournée vers la diminution du volume des prestations, les suppressions de postes, quoi qu’il en coûte humainement, et d’une dématérialisation « hors sol », de plus en plus aux mains d’opérateurs privés.

Les CAF, sont de ce fait parfois perçues comme les vecteurs d’une maltraitance institutionnelle qui touche en premier lieu les personnes les plus vulnérables, qu’il s’agisse de femmes seules avec enfants, des personnes les plus pauvres, de ceux et celles qui connaissent des situations professionnelles instables ou sont en situation de handicap. Ces pratiques contribuent à alimenter le non-recours aux droits. Certains renoncent à demander des prestations, craignant de devoir rembourser des indus liés à un fonctionnement devenu imprévisible.

Alors que la préparation de la prochaine Convention d’objectifs et de gestion est engagée et que la place de la solidarité dans notre pays fait l’objet de fortes remises en cause, nous demandons au gouvernement de procéder à six changements d’orientation majeurs pour que « la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » (préambule de la Constitution de 1946) et que les CAF puissent pleinement jouer leur rôle.

1. Respecter le droit

Les décisions rendues par les CAF doivent respecter la loi et le droit européen, être motivées et notifiées, respecter le « reste à vivre » en cas de remboursements. Ces dispositions légales ne sont presque jamais respectées. De simples erreurs ou incompréhensions, même répétées, ne peuvent être qualifiées de fraudes.

Nous demandons l’explicitation des raisons des décisions et de leurs fondements juridiques, le respect du contradictoire, l’interdiction des décisions automatiques, des retenues et des suspensions de versements de prestations sans justification, des contrôles répétitifs et des sanctions. Chaque personne concernée par ces mesures doit a minima être reçue en amont par un agent qualifié de la CAF, afin de pouvoir comprendre ce qui lui est reproché, s’expliquer et pouvoir se défendre.

L’exception au principe légal « silence vaut accord », doit être abrogée, afin que la non-réponse de la CAF à une demande vaille acceptation et non plus refus, comme le recommande la Commission nationale consultative des Droits de l’Homme.

2. Rétablir la transparence et la possibilité d'obtenir justice

Pour permettre à chacun.e de faire valoir ses droits, nous demandons la fin d’une politique du secret et davantage de transparence par la publication systématique des circulaires internes, lettres réseau et autres informations techniques ayant des effets notables sur les droits ou la situation des allocataires, conformément à ce qu’a décidé le Conseil d’État le 4 juin 2022.

Ces informations doivent  être disponibles sur le site de manière complète et adéquate, et partagées avec les associations accompagnant les allocataires dans l’accès à leurs droits. Chacune et chacun doit pouvoir ensuite accéder, sous une forme intelligible, à ses données personnelles et au raisonnement qui sous-tend le traitement de ces données, y compris de ses conséquences, ainsi que le prévoit la loi Informatique et libertés.

3. Restaurer l'accueil physique des usagers

Cet accueil doit être assuré par des agents formés et qualifiés des CAF, disponibles, à l’écoute, habilités à régler les situations dans leur diversité et leur complexité. Remettre de l’humain est nécessaire pour que le service public fonctionne, et l’usager doit avoir le choix de son mode de relations avec l’administration.

Un plan massif d’embauche de plusieurs milliers d’agents est pour cela nécessaire, afin de répondre à des besoins croissants et permettre aux services sociaux d’effectuer en interne un nécessaire travail de médiation, en tenant compte des situations spécifiques. Les critères de gestion et d’intéressement doivent valoriser le temps passé à un traitement qualitatif des demandes et non le volume d’indus récupérés ou de fraudes.

4. Associer les allocataires aux décisions

Il s’agit de développer des logiques de confiance et de solidarité, et non de méfiance et de suspicion, d’en finir avec des pratiques de profilage et de ciblage des plus vulnérables, d’acharnement procédural en cas de contentieux. Il est nécessaire, pour sortir des impasses actuelles, de coconstruire dans la durée une organisation souple, afin d’améliorer en permanence les pratiques par le dialogue et la coopération à tous les niveaux, en associant les allocataires aujourd’hui cruellement absents des décisions.

5. Coconstruire un numérique transparent, au service des allocataires et des agents

La CNAF et ses autorités de tutelle doivent fournir en toute transparence des garanties sur le strict respect des réglementations et de la protection des allocataires dans les programmes informatiques. Cette exigence englobe les programmes développés ou proposés clés en main par des prestataires privés.

Il s’agit notamment de s’assurer que les données personnelles sont traitées en conformité avec le RGPD et le Code des relations entre le public et l’administration, que leur hébergement est sécurisé et que les droits des allocataires (droit d’accès, droit de rectification, droit à l’explication) sont respectés et simples à mettre en œuvre. Pour tout cela, il est nécessaire de renforcer les équipes informatiques internes. Les allocataires et les associations impliquées dans l’accès aux droits sociaux et la défense des droits fondamentaux, tout comme les agents utilisateurs au sein des CAF, doivent être associés à l’évaluation et à l’évolution des outils numériques existants, ainsi qu’aux futurs développements.

Nous demandons un contrôle indépendant sur les programmes informatiques, notamment par l’IGAS, le Défenseur des droits et la CNIL, laquelle devra systématiquement actualiser ses avis en fonction des évolutions technologiques (utilisation de l’intelligence artificielle, de chatbots et de RPA, algorithmes d’aide à la décision…). 

6. En finir avec l’affaiblissement de la protection sociale…

…et ses effets délétères sur la cohésion sociale, la santé et les droits. Il est nécessaire de revoir les objectifs d’évolutions budgétaires transmis à l’Union européenne pour les cinq années à venir, qui présentent un budget stable alors que celui-ci devrait s’accroître avec l’élargissement de l’accès aux droits. Ces orientations doivent se traduire également par une augmentation des moyens de fonctionnement des CAF afin qu’elles puissent apporter une réponse de qualité aux besoins des allocataires et combattre le non-recours.

*****

À travers ces changements d’orientation majeurs, nous réaffirmons la nécessité, face aux incertitudes sociales, économiques et écologiques, d’une société solidaire de justice et de droit, où chacun a sa place. À l’heure où la nouvelle Convention d’Objectifs et de Gestion est en préparation, nous demandons qu’un large débat public se développe autour de ces propositions avec la CNAF, les CAF départementales, le gouvernement et l’ensemble des associations, collectivités et citoyens conscients que les CAF vont avoir dans les prochaines années un rôle de plus en plus essentiel face aux immenses défis écologiques, sociaux, sanitaires et économiques qui nous attendent.

Nous invitons les associations et les citoyens à diffuser largement cet appel, le porter auprès des CAF, des élus et des associations à en débattre localement et à multiplier les groupes d’entraide afin que personne ne reste seul face à ses difficultés.

Premières organisations signataires

Collectif Changer de cap ; LDH Ligue des droits de l’Homme ; Fondation Abbé Pierre ; Emmaüs France ; APF France Handicap ACEPP Association nationale des collectifs parents, enfants, professionnels ; MNCPMouvement National des chômeurs et précaires ; CNAFAL Conseil national des assos familiales laïques ; collectif Convergences Services Publics convergence nationale de défense et de développement des services publics ; ANASAssociation nationale des assistants de service social ; Union des Mutuelles de Vaucluse Mutuelle Ouvriere de Santé ; Droit au Logement  ; AC ! Agir contre le chômage Agir Ensemble contre le Chômage et la Précarité ; Association Droits et Habitats  ; GISTI Groupe d’information et de soutien des immigrés ; Dom’asile  ; Coordination nationale Pas sans Nous  ; Femmes contre les précarités, le chômage et les discriminations  ; Handi-Social Lutte contre le validisme et défenses des droits des personnes handicapées ; La Quadrature du net  ; Le Mouton numérique AequitaZ Artisans de justice sociale ; Collectif pour une éthique en travail social AFVS Association des Familles Victimes du Saturnisme ; Stop Précarité MFRB Mouvement Français pour un Revenu de Base ; AC ! 63 Agir Ensemble contre le Chômage et la Précarité ; AC! Gironde Agir Ensemble contre le Chômage et la Précarité ; AC! Grand Est Agir Ensemble contre le Chômage et la Précarité ; acceuil et soutien aux migrants St Georges de Reneins (69) ; ACCP – MNCP 66 maison de chômeurs des Pyrénées Orientales  ; ACINA Accueil, coopération et insertion pour les nouveaux arrivants ; AFL MNCP Commercy Association Familiale Laïque – MNCP de Commercy (55) ; Ah Bienvenue Clandestins ! Art et Culture ; AITEC Association internationale et techniciens, experts et chercheurs ; APICED Association pour la promotion individuelle et collective, et pour l’égalités des droits ; Association Adéquations développement humain et égalité hommes/femmes ; Association France-Congo  ; Association GEM La Vie PloërmelAssociation Habitat-Cité  ; Association SECU99 PloërmelAU68 Associations unies du Haut RhinCitoyens pour la justice et la cohésion sociale Collectif pour un revenu minimum garanti  ; CORENS Coopération internationale ; CREER – MNCP Défense des droits des chômeurs et précaires ; Ensemble pour un Toit 70 Femmes relais Mediatrices interculturelles de Champigny ; Gem Mine de rien Avignon ; Initiatives Solidaires Insertion par l’activité économique Stains ; Les amoureux au ban public Accompagnement & Conseil couples binationaux ; MCM Maison de la Citoyenneté Mondiale Mulhouse ; Ouverture du Coeur asso humanitaire, entraide sociale ; Réseau Hospitalité Accueil et défense des personnes exilées ; RSA38 Grenoble  ; SCOP L’Après M, Marseille  ; TadamunExil70 Accueil des exilés et accès aux droits fondamentaux ; Planning familial 44 ; association Solidarité Jean Merlin domiciliation de personnes sans domicile stable.

Petit historique

Notre collectif, après avoir reçu plus d’une centaine de témoignages d’allocataires, a constaté l’existence de nombreuses pratiques illégales (notifications sommaires, suspensions des prestations sans explications, notamment lors des contrôles, etc.) et une maltraitance institutionnelle les plus fragiles. Les progrès foudroyants du numérique ont entraîné une déshumanisation des relations, une multiplication des contrôles discriminatoires, l’impossibilité pour les ayants droit de communiquer avec une personne physique.

Pour redresser cette situation, une série de propositions ont été formulées, dont vous pourrez trouver ici les explications détaillées :

Nous demandons que ces propositions réorientent la Convention d’objectifs et de gestion qui doit être prochainement renouvelée. Elles s’adressent à la CNAF, mais aussi aux autorités de tutelle, notamment au ministère du Budget.

Ce travail, qui a fait l’objet d’une large médiatisation (Envoyé spécial, Secrets d’infos sur France Inter, Libération, etc.), a mobilisé de nombreux militants, des avocats, des associations accompagnantes, des informaticiens, des allocataires. Plusieurs mouvements nationaux (Ligue des Droits de l’Homme, Secours Catholique, Fondation Abbé Pierre, ATD quart-monde, GISTI, ANAS, MNCP, etc.), en partagent aujourd’hui les conclusions.

Le Collectif Changer de cap accompagné par quatre de ces organisations, a été invité par le directeur général de la CNAF à lui présenter ces propositions. La CNAF y a répondu par écrit (voir ici sa réponse circonstanciée — 13 pages). Sur ces bases, un dialogue a commencé à s’engager sur quelques questions précises (voir ici le contenu de ces échanges).

Mais nous savons que ni la CNAF ni le gouvernement ne renonceront spontanément à leur logique et que pour être entendus, il est nécessaire que ces propositions soient appuyées par de très nombreuses associations et citoyens.

L’objectif est aussi de multiplier les mobilisations locales et de poursuivre dans les prochains mois une réflexion commune. Nous proposerons d’ici quelques semaines une rencontre avec les signataires pour faire le point sur cette action.