Changer de cap

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Chez Marguerite, le café citoyen nomade

café citoyen nomade chez Marguerite dans le Clunisois

Crédit photo : Foyer rural du Grand Secteur Clunisois

Le 7 juillet 2023, des membres de Changer de Cap ont découvert l’action du café citoyen nomade Chez Marguerite qui stationnait ce jour-là et le suivant sur la place de l’église à Burzy, au nord du territoire du Clunisois, en sud Bourgogne. Au menu de ces deux journées dans ce village de 60 habitants où le seul lieu de rencontres permanent est la boulangerie : un atelier d’écriture sur la mobilité, des jeux géants animés par la Ludo Verte du Clunisois, un café mémoire et une visite commentée de l’église romane Sainte-Foy de Burzy avec le Pays d’art et d’histoire. En soirée, des concerts : histoires d’amour racontées par la chanson française, chanteuse en trio avec un batteur et guitariste, concert de guitare électrique. Durant les deux jours, une exposition a présenté des œuvres plastiques des habitants du lieu.

Et tout cela se passe… dans un bus aménagé répondant au doux nom de Marguerite !

Chez Marguerite, c’est en effet un café citoyen nomade au service des habitants du territoire et un projet porté par le foyer rural du Grand Secteur Clunisois. Le projet est né en 2018 d’un constat d’isolement des habitants des petites communes en territoire rural, avec des problèmes d’accès aux soins, d’accès aux transports et d’absence de liens entre les personnes. Depuis, le bus Marguerite déambule dans une quinzaine de villages du Clunisois d’avril à octobre. C’est un lieu d’information sur les services de proximité, les actions associatives, les projets territoriaux, les possibilités dont les citoyens peuvent bénéficier.

Il est également le support d’ateliers, de causeries à thème (les causeries Marguerite), de café-concert, de tribunes d’initiatives. Il peut aussi devenir une scène ouverte pour des spectacles, un lieu d’exposition. Quelques tables et chaises sont déployées autour du bus itinérant et constituent un espace de convivialité, pause-café comprise. Selon les lieux, tel un caméléon, Marguerite prend donc des couleurs différentes en fonction des attentes des habitants.

Le programme est élaboré sur mesure, après un appel lancé à l’ensemble des communes en début d’année. Il y a ensuite un travail de préparation en termes de contenu des activités et de logistique avec les habitants des villages volontaires, les associations, les acteurs et les forces vives de la commune. Ce qui donne une première occasion de se rencontrer et de tisser des liens.

Marguerite a ainsi vu naître des projets originaux, comme à Saint-André-le-Désert une réappropriation de l’histoire du village à partir des cartes postales, ou à Sigy-le-Chatel la mise en place d’un dispositif de mobilité pour aller au marché.

Le projet s’appuie sur Patrick, un salarié à temps partiel du FRGS et une équipe de bénévoles. Pour chaque étape, un référent est chargé de faire une évaluation permanente et participative de l’action, avec les salariés et les bénévoles de l’association. Les appuis principaux viennent de la Communauté de communes, du Département et de la Région.

Le FRGS a rencontré des initiatives analogues : un bus culturel qui fait du théâtre dans le nord Bourgogne, avec un programme bien établi. Un minibus social dans la Manche qui développe l’écoute, un bus-exposition artistique dans les Pyrénées-Orientales.

Une causerie Marguerite sur les projets de panneaux solaires

À 17 heures, le 27 juillet 2023, nous avons pu assister à une causerie Marguerite, organisée en réponse aux interrogations des maires de Burzy et de Bonnay sur les conditions de mise en place de panneaux solaires collectifs. Une quinzaine de personnes étaient présentes, dont Philippe Bertrand (maire de Burzy), Jean-Pierre Renaud, maire de Bonnay jusqu’à cette année (la commune a fusionné avec celle de Saint-Ythaire), le maire d’une commune voisine et plusieurs habitants. L’objectif était d’aborder les questions que se posent les gens et les élus. Quelle attitude peuvent avoir les communes par rapport à des projets collectifs proposés par des opérateurs privés qui les démarchent toujours plus nombreux ? Comment conseiller les habitants qui veulent s’équiper ?

Deux conceptions opposées

Philippe Bertrand (maire de Burzy) a expliqué comment sa commune a installé il y a trois ans, avec Enercoop, des panneaux solaires le long de la ligne de TGV qui traverse l’ensemble des communes, A Bonnay un projet similaire a été plus long à mettre en place..

Tous les participants à la causerie sont d’accord sur les orientations proposées par la Communauté de communes et par Enercoop : conjuguer une vision opérationnelle, une participation citoyenne et une vision écologique ; ne pas détruire de terres agricoles, préserver les paysages, garder la maîtrise du projet par les habitants et la collectivité.

Les deux projets déjà en cours de réalisation répondent à ces conditions. Enercoop fait l’investissement et verse une redevance par hectare (10 000 euros par an), mais avant tout, ces projets se distinguent des opérations proposées par des opérateurs privés qui s’approprient les terrains dans un but de rentabilité et se contentent de verser une redevance.

Concrètement, les panneaux solaires sont installés sur des remblais du TGV, afin de ne pas nuire aux terres agricoles et préserver les paysages. Il s’agit de terrains improductifs ou peu fertiles, voire des remblais eux-mêmes quand ils sont bien orientés. Les projets sont coopératifs, avec une participation citoyenne et la possibilité de placer son épargne en investissant. Et la commune a encore à son mot à dire.

Lors de la réunion, Aline, vice-présidente Climat de la Communauté de communes, a indiqué que celle-ci soutient ce type de projets et travaille en partenariat avec Enercoop, dans une relation de confiance. La communauté de communes réfléchit à une production photovoltaïque à travers des contrats sur 20 ans avec un prix garanti.

Portée et sens de cette action

Jean-Luc Delpeuch, le président de la Communauté de communes, a pour sa part développé le sens de cette action. « Nous sommes lancés depuis plusieurs mandats sur l’objectif d’un territoire à énergie positive. Aujourd’hui, la production représente 3 % de la consommation électrique. En comptant le bois, on est à 20 % de l’énergie consommée. Aujourd’hui, avec la guerre en Ukraine et l’accroissement du prix de l’énergie, les coûts du renouvelable sont en train de décroître en valeur relative. À terme, il devient plus économique ».

Le projet de territoire adopté s’intitule « Vivre ensemble dans le Clunisois dans le monde de l’après ». Pour Jean-Luc Delpeuch, « si chacun reste chacun dans son trip individuel, on passe à côté de cet objectif. Il faut réfléchir à comment faire autrement face aux déstabilisations en cours. Mais il faut également réfléchir pour savoir comment vivre autrement avec nos voisins, avec l’État, l’Europe, etc. Il y a des projets de solaire en toiture. Si on a une maison bien exposée, on peut produire son eau chaude, on peut produire de l’électricité, parfois on peut gagner des sous dans un projet d’énergie renouvelable. Pour des projets similaires, nous avons eu des aides collectives, la collaboration de professionnels, un compagnonnage entre bénévoles et professionnels (assistantes sociales, fonctionnaires territoriaux…). C’est une démarche qu’on veut faciliter afin que chacun soit partie prenante ».

Dans le Clunisois

La Communauté de communes du Clunisois rassemble 41 communes au sud du département de la Saône-et-Loire. Ce territoire rural, néanmoins dynamique et engagé, abrite 14 452 habitants, dont 5 137 dans la petite ville de Cluny.

Les Rencontres 2023 de notre collectif se sont déroulées début juillet dans le Clunisois, précisément à la Maison des Utopies en Expérimentation (MUE) située à Château. Elles furent l’occasion de belles découvertes, d’un territoire, de ses acteurs, de ses habitants, dont le bus citoyen nomade Chez Marguerite.

Il est l’une des initiatives inspirantes du Foyer rural du Grand Secteur Clunysois (FRGSC), qui anime également l’Université rurale du Clunisois.