CAF et déshumanisation : l'action se poursuit
En mai, les analyses et les propositions que nous avions formulées ont été traduites dans un appel signé par de nombreux mouvements nationaux : Ligue des Droits de l’Homme, Emmaüs France, Secours catholique, fondation Abbé Pierre, ATD quart-monde, Convergence Services publics, GISTI, ANAS, MNCP, APF-France Handicap, etc. Au total, 80 organisations nationales et locales et 1200 personnes à titre individuel. Cet appel a été envoyé au ministre des Solidarités et au ministre du Budget, qui assurent la tutelle des CAF, en vue d’infléchir la convention d’objectifs et de gestion de la branche famille, qui fixe pour les cinq années à venir les orientations et les moyens des CAF.
Cette convention d’objectif et de gestion a été signée le 4 juillet 2023. Elle reprend au niveau des intentions une partie de nos observations : elle reconnaît une détérioration de la qualité des services, une forte hausse des indus et des rappels, une dégradation de la relation avec les allocataires. Elle reconnaît que les variations de droits, les successions d’indus et rappels, les suspensions préventives de versement des prestations créent de l’insécurité pour les allocataires et engendrent un renoncement aux droits. Il y a donc un net infléchissement du discours.
Mais l’objectif central reste bien une dématérialisation totale, synonyme de déshumanisation totale, le renforcement des contrôles et la baisse du volume des prestations.
Un inventaire des anomalies a été établi au cours de l’été pour recenser les pratiques illégales (décisions automatiques, non-respect du contradictoire), discriminatoires, légales mais contraires aux principes fondamentaux du droit ou à la dignité humaine (non-respect du reste à vivre ), et ont été traduits en propositions de modifications législatives ou réglementaires.
De son côté, le gouvernement a présenté le projet de loi pour le plein emploi, qui instaure une mise en activité contrainte des bénéficiaires du RSA à travers un renforcement des obligations et des contrôles. Le gouvernement entend le faire voter en urgence par l’Assemblée nationale à partir du 25 septembre. Tout indique que cette loi va amplifier et démultiplier les anomalies constatées depuis deux ans avec les CAF : décisions automatiques, harcèlement, dispositions illégales, pratiques abusives, contrôles à charge. Cela risque d’accroître fortement le non-recours, alors que le même gouvernement prétend vouloir lutter contre par la « solidarité à la source ».
L’inventaire des anomalies et des propositions a été très utile à différents groupes parlementaires (NUPES, LIOT). On en retrouve le contenu dans de nombreux amendements examinés en commission des affaires sociales. Nous ne savons pas quel sort sera réservé en plénière à ceux qui ont été adoptés en commission des affaires sociales, mais cette prise en compte marque une reconnaissance du travail réalisé au cours des derniers mois.
Pour autant, l’action commune vis-à-vis des CAF n’est pas terminée, elle prend au contraire une nouvelle dimension. Nous devons poursuivre la mobilisation pour faire respecter le droit, retrouver les indispensables relations humaines, dénoncer la maltraitance des plus vulnérables et le double langage.
Notre combat s’inscrit dans le cadre plus large de la lutte pour des services publics dignes de ce nom. Une action simple, réalisable par chacun, consiste à signer la pétition lancée par Convergence Service Public « Pour que le budget de la sécurité sociale réponde en 2024 aux besoins de la population ».