Signez, faites signer l’appel

pour remettre l’humain et le droit dans l’action des CAF

Le collectif Changer de Cap a constaté en effet, à travers de nombreux témoignages, la multiplication de pratiques illégales et illégitimes dans les pratiques des CAF : notifications sommaires, suspensions des prestations sans explications, notamment lors des contrôles, indus inexpliqués, non-respect du reste à vivre.

Ces pratiques entrainent une maltraitance institutionnelle des allocataires en situation difficile ou précaire, aux revenus irréguliers. Un algorithme établit automatiquement un ciblage des contrôles sur les personnes et des familles les plus vulnérables.

« En dix mois, j’ai subi trois erreurs de la CAF qui ont généré deux dettes alors que mes déclarations avaient été faites avec exactitude »

 « Je vis chaque mois avec la boule au ventre en me demandant si je vais pouvoir payer mon loyer ou si la CAF va me demander de rembourser les allocations qu’elle a daigné m’envoyer »

« Je suis sortie du contrôle avec l’impression que tout ce à quoi je croyais était renversé. La CAF n’était pas une alliée, mais quelque chose de malsain »

Dans le même temps, les progrès foudroyants du numérique sont utilisés pour mettre en place un contrôle social généralisé et provoquent une déshumanisation des relations. Celle-ci se traduit par l’impossibilité pour les ayants droits de parler avec une personne physique et d’obtenir justice. La dématérialisation à outrance encourage le non recours.

« Dans le cadre d’un contrôle sur pièces, un rendez-vous m’a été proposé sur mon espace personnel. Lorsque j’ai répondu que je ne pouvais pas me déplacer puisque j’étais hospitalisée à plus de 20 km depuis plusieurs mois, il m’a été répondu que je ne pouvais déplacer le rendez-vous qu’une fois, sinon toutes mes allocations seraient suspendues »

 « Mes droits sont complètement bloqués. Nous rentrons dans une situation de grande précarité car mon mari est en invalidité, après un grave accident de moto. Nous n’avons plus de quoi payer nos factures et notre loyer »

 « Je n’ai reçu aucune notification, seul mon compte allocataire me présente un espace Mes dettes avec 31 955€ à rembourser »

Les réductions d’effectifs imposées par la tutelle conduisent à démanteler et à externaliser progressivement le service public des CAF, tout comme cela a été fait pour La Poste et les hôpitaux en réduisant leurs ressources. Ces mesures provoquent une désorganisation au sein des caisses et engendrent une souffrance au travail des agents.

« Quand la machine bugue, il faut refaire des calculs à la main, mais le logiciel peut refuser de valider le dossier.

« Le plus dur, c’est de répondre aux allocataires qui nous demandent pourquoi il y a une baisse importante, ou pourquoi il y a des créances injustifiées, alors qu’on ne peut pas répondre »

On craint des burn-out en série des agents, déjà sous la pression des plans successifs de réduction des effectifs. Je vois des collègues pleurer. En 2022, nous avons enregistré 21 départs d’agents chevronnés »

Alors que la prochaine Convention d’objectifs et de gestion est en négociation entre la CNAF et ses autorités de tutelle, engageant la politique des CAF pour les années à venir, le gouvernement s’apprête à imposer une nouvelle dégradation de l’exercice de la solidarité nationale pourtant garantie par la Constitution.

C’est pourquoi nous vous invitons à signer cet appel, lancé par 75 organisations et 1000 signataires individuels, à le diffuser largement, le porter auprès des CAF, des élus et des associations, à en débattre et se mobiliser localement.

Ces changements d’orientation majeurs seront envoyés aux ministres et aux institutions concernés dans les prochaines semaines.

 

Texte de l’appel

Six changements d’orientation majeurs sont nécessaires pour remettre l’humain et le droit au cœur de l’action des CAF

 

Les Caisses d’Allocations Familiales (CAF) ont pour mission d’être au service des allocataires, comme le veut l’article L583-1 du Code de la Sécurité sociale, et sont aujourd’hui des acteurs essentiels des politiques de solidarité. Or nous constatons chaque jour, à travers nos pratiques, les difficultés grandissantes des allocataires pour faire valoir leurs droits et les conséquences délétères d’une gestion tournée vers la diminution du volume des prestations, les suppressions de postes, quoi qu’il en coûte humainement et d’une dématérialisation « hors sol », de plus en plus aux mains d’opérateurs privés.

Les CAF, sont de ce fait parfois perçues comme les vecteurs d’une maltraitance institutionnelle qui touche en premier lieu les personnes les plus vulnérables, qu’il s’agisse de femmes seules avec enfants, des personnes les plus pauvres, de ceux et celles qui connaissent des situations professionnelles instables ou sont en situation de handicap. Ces pratiques contribuent à alimenter le non-recours aux droits. Certains renoncent à demander des prestations, craignant de devoir rembourser des indus liés à un fonctionnement devenu imprévisible.

Alors que la préparation de la prochaine Convention d’objectifs et de gestion est engagée et que la place de la solidarité dans notre pays fait l’objet de fortes remises en cause, nous demandons au gouvernement de procéder à six changements d’orientation majeurs pour que « la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » (préambule de la Constitution de 1946) et que les CAF puissent pleinement jouer leur rôle (accéder ici au dossier):

1 Respecter le droit. Les décisions rendues par les CAF doivent respecter la loi et le droit européen, être motivées et notifiées, respecter le « reste à vivre » en cas de remboursements. Ces dispositions légales ne sont presque jamais respectées. De simples erreurs ou incompréhensions, même répétées, ne peuvent être qualifiées de fraudes. Nous demandons l’explicitation des raisons des décisions et de leur fondements juridiques, le respect du contradictoire, l’interdiction des décisions automatiques, des retenues et des suspensions de versements de prestations sans justification, des contrôles répétitifs et des sanctions. L’exception au principe légal « silence vaut accord », doit être abrogée, afin que la non-réponse de la CAF à une demande vaille acceptation et non plus refus, comme le recommande la Commission nationale consultative des Droits de l’Homme.

2 Rétablir la transparence et la possibilité d’obtenir justice. Pour permettre à chacun.e de faire valoir ses droits, nous demandons la fin d’une politique du secret et davantage de transparence par la publication systématique des circulaires internes, lettres-réseau et autres informations techniques ayant des effets notables sur les droits ou la situation des allocataires, conformément à ce qu’a décidé le Conseil d’État le 4 juin 2022. Ces informations doivent être disponibles sur le site de manière complète et adéquate, et partagées avec les associations accompagnant les allocataires dans l’accès à leurs droits. Chacun.e doit pouvoir ensuite accéder, sous une forme intelligible, à ses données personnelles et au raisonnement qui sous-tend le traitement de ces données, y compris de ses conséquences, ainsi que le prévoit la loi Informatique et libertés.

3 Restaurer l’accueil physique des usagers par des agents formés et qualifiés des CAF, disponibles, à l’écoute, habilités à régler les situations dans leur diversité et leur complexité. Remettre de l’humain est nécessaire pour que le service public fonctionne, et l’usager doit avoir le choix de son mode de relations avec l’administration. Un plan massif d’embauche de plusieurs milliers d’agents est pour cela nécessaire, afin de répondre à des besoins croissants et permettre aux services sociaux d’effectuer en interne un nécessaire travail de médiation, en tenant compte des situations spécifiques. Les critères de gestion et d’intéressement doivent valoriser le temps passé à un traitement qualitatif des demandes et non le volume d’indus récupérés ou de fraudes.

4 Associer les allocataires aux décisions et à leur co-construction. Il s’agit de développer des logiques de confiance et de solidarité, et non de méfiance et de suspicion, d’en finir avec des pratiques de profilage et de ciblage des plus vulnérables, d’acharnement procédural en cas de contentieux. Il est nécessaire, pour sortir des impasses actuelles, de co-construire dans la durée une organisation souple, afin d’améliorer en permanence les pratiques par le dialogue et la coopération à tous les niveaux, en associant les allocataires aujourd’hui cruellement absents des décisions.

5 Co-construire un numérique transparent, au service des allocataires et des agents. La CNAF et ses autorités de tutelle doivent fournir en toute transparence des garanties sur le strict respect des réglementations et de la protection des allocataires dans les programmes informatiques. Cette exigence englobe les programmes développés ou proposés clés en main par des prestataires privés. Il s’agit notamment de s’assurer que les données personnelles sont traitées en conformité avec le RGPD et le Code des relations entre le public et l’administration et que les droits des allocataires (droit d’accès, droit de rectification, droit à l’explication) sont respectés et simples à mettre en oeuvre. Pour tout cela, il est nécessaire de renforcer les équipes informatiques internes. Les allocataires,les associations et les agents doivent être associés à l’évaluation et à l’évolution des outils numériques existants. Nous demandons un contrôle indépendant sur les programmes informatiques, notamment par l’IGAS, le Défenseur des droits et la CNIL, laquelle devra systématiquement actualiser ses avis en fonction des évolutions technologiques (utilisation de l’intelligence artificielle, de chatbots et de RPA, algorithmes d’aide à la décision…). 

6 En finir avec l’affaiblissement de la protection sociale et ses effets délétères sur la cohésion sociale, la santé et les droits. Il est nécessaire de revoir les objectifs d’évolutions budgétaires transmis à l’Union européenne pour les cinq années à venir, qui présentent un budget stable alors que celui-ci devrait s’accroître avec l’élargissement de l’accès aux droits. Ces orientations doivent se traduire également par une augmentation des moyens de fonctionnement des CAF afin qu’elles puissent apporter une réponse de qualité aux besoins des allocataires et combattre le non-recours.

*

À travers ces changements d’orientation majeurs, nous réaffirmons la nécessité, face aux incertitudes sociales, économiques et écologiques, d’une société solidaire de justice et de droit, où chacun a sa place. A l’heure où la nouvelle Convention d’Objectifs et de Gestion est en préparation, nous demandons qu’un large débat public se développe autour de ces propositions avec la CNAF, les CAF départementales, le gouvernement et l’ensemble des associations, collectivités et citoyens conscients que les CAF vont avoir dans les prochaines années un rôle de plus en plus essentiel face aux immenses défis qui nous attendent, écologiques, sociaux, sanitaires et économiques.

Nous invitons les associations et les citoyens à diffuser largement cet appel, le porter auprès des CAF, des élus et des associations à en débattre localement et à multiplier les groupes d’entraide afin que personne ne reste seul face à ses difficultés.

Vous pouvez joindre ici votre signature individuelle

Vous pouvez joindre ici la signature de votre organisation

Contact : Changer de cap : Valérie 07 48 90 55 95 ou Céline 06 76 76 20 52

Pour voir les témoignages et les propositions détaillées rendez-vous sur le site www.changerdecap.net

Organisations signataires

Collectif « Changer de cap » ; LDH, Ligue des Droits de l’Homme ; Fondation Abbé Pierre ; APF France Handicap ; La CIMADE ; ACEPP, Association nationale des collectifs parents enfants professionnels ; MNCP Mouvement National des chômeurs et précaires ; CNAFAL, Conseil national des assos familiales laiques ; CNLRQ, Comité national de liaison des Régies de quartier ; Convergence Services publics, Convergence nationale de défense et de développement des services publics ; Union Des Mutuelles de Vaucluse, Mutuelle ouvrière de santé ; La Case de Santé, centre de Santé Communautaire ; ANAS, Association nationale des assistants de service social ; ADVOCACY Paris IDF, espace convivial citoyen ; Droit au Logement ; COMEDE Comité pour la santé des exilé.e.s ; CGT Insee ; AC!, Agir Ensemble contre le Chômage et la Précarité ; Association Habitat-Cité ; Réseau Hospitalité, accueil et défense des personnes exilées ; ACINA Accueil coopération et insertion pour les nouveaux arrivants ; AC ! 63, Agir Ensemble contre le Chômage et la Précarité ; Association Droits et Habitats, Paris 18e ; GISTI, Groupe d’information et de soutien des immigrés ; Les Amoureux au ban public, accompagnement et conseil couple binationaux ; Dom’asile ; Pas sans Nous, Coordination nationale Pas sans Nous ; Femmes contre les précarités le chômage et les discriminations ; Handi-Social ; Sciences Critiques ; AITEC, Association internationale et techniciens experts et chercheurs ; La Quadrature du net ; Le Mouton numérique ; Aequitaz, Artisans de justice sociale ; Collectif pour une éthique en travail social ; AFVS, Association des Familles Victimes du Saturnisme ; APICED, Asso pour la promotion individuelle et collective et l’égalité des droits ; Stop Précarité ; MFRB, Mouvement Français pour un Revenu de Base ; Collectif pour un revenu minimum garanti ; Coordination régionale des Pass Ara ; ASFM Guadeloupe ; CATRED ; Réseau Féministe « Ruptures » ; asSociation KOLONE ; AVEC, Association pour le Vivre Ensemble à Colombes ; Association Ayyem Zamen ; Solidarité Jean Merlin ; MCM, Maison de la citoyenneté mondiale mulhouse ; Planning Familial de Loire Atlantique ; TadamunExil70, Aide et défense des demandeurs d’asile ; Ensemble pour un Toit 70 ; Ah Bienvenue Clandestins !, Art et Culture ; Association France-Congo ; Les amoureux au ban public Bergerac, Accompagnement et conseil couple binationaux ; Association SECU99, Ploërmel ; Accueil et soutien aux migrants ; AC! Gironde ; GEM Mine de rien ; Ouverture du Coeur, asso humanitaire entraide sociale ; Femmes relais, Mediatrices interculturelles de Champigny ; Association GEM La Vie ; Citoyens pour la justice et la cohésion sociale, Nanterre ; AFL-MNCP55, Association Familiale Laïque – MNCP de Commercy (55) ; CORENS, Coopération internationale ; Initiatives Solidaires ; AC! Grand Est ; ACCP.MNCP, Maison de chômeurs des Pyrénées Orientales ; CREER – MNCP ; Groupe LFI Saint-Denis ; Association Adéquations, Développement humain égalité hommes/femmes ; AU 68, Associations unies du Haut Rhin ; RSA38 ; SCOP L’Après M Marseille ; UNRPA – Fédération de Paris, Accès aux droits et la prévention santé et autonomie ; Terrain d’Entente, Pédagogie sociale.

Signataires individuels

Evelyne PERRIN, Stop Précarité ; Jean-Louis BORIE, Avocat, ancien batonnier, Clermont-Ferrand ; Maryse ARTIGUELONG, vice-présidente LDH ; Jean-François MARTEL , Réseau des Théâtres de l’Opprimé ; Odile MAURIN, présidente Handi Social et élue municipale à Toulouse ; Gilles ROUBY, président du Collectif des Associations Citoyennes ; Pierre-Etienne DOLINO, Pasteur-directeur Fraternité de la Belle de Mai Marseille ; Didier MENARD, médecin, association de santé communautaire de Saint Denis ; Christine DELLIAUX, CGT (Travailleurs Privés d’emploi et Précaires ) ; Marie-Aleth GRARD ; Hugues DE COURTIVRON, ATD QUART MONDE ; David BAPCERES, Avocat ; Marion OGIER , membre de la LDH ; Isabelle MAURER, Allocataire RSA ; Joran LE GALL, président de l’ANAS ; Farida AMRANI, Députée de l’Essonne ; Didier MINOT, Changer de cap ; Didier DUBASQUE, ancien président de l’ANAS ;; Françoise BLOCH, socio-anthropologue ; Marianne BLIN ; Martine DUTOIT, ADVOCACY-PARIS ; Sarah SAÏDI, travailleuse sociale ; Agnès SPIQUEL, Société des Etudes camusiennes ; Jean-Claude BOUAL, militant syndicaliste CGT ; Claude POURCHER, Gilets jaunes de Montceau les Mines ; François PUJOL, Maire honoraire de Savournon (05) ; Jean-louis LELEU, Chom’actif Clermont Fd ; Jean-Baptiste EYRAUD, Droit au logement ; Christiane LACASSAGNE, Restaurants et Relais du coeur 91 ; Cécile SPORTIS, Conseillère honoraire des Affaires Etrangères ; Roland BOURGLAN, accompagnant d’allocataires ; Pierre COURS-SALIES, Ensemble ! ; Catherine WILLEM, Bénévole Secours populaire ; Clément TERRASSON , avocat ; Benoit HAZARD, Anthropologue, CNRS ; Alain COUDERT, AC ! 63 ; Benedicte MADELIN, Militante associative; Roger WINTERHALTER, maire honoraire de Lutterbach ; Eric DENOYELLE, Collectif pour une éthique en travail social ; Etienne ADAM , Comm chômage précarité pauvreté d’Ensemble ; Jean-Luc ROMERO, Adjoint à la maire de Paris ; Laurent KLAJNBAUM, collectif pour Mimmo ; Franck TIMBAL, traducteur interprète droit syndical et social ; Fabienne DOROY, magistrate honoraire ; Jean-Pierre RAFIER , Ligue des Droits de l’Homme ; Linda SIMONET, avocate ; Jérôme BAR, Aequitaz ; Halima MENHOUDJ, Adjointe au Maire de Montreuil ; Bernadette NANTOIS, APICED ; Marion DUCASSE, Aequitaz ; Arlette LE PERRUN, Planning familial 86 ; Fabienne BIANCARDINI, Hospitaliere ; Christine RADAIS, Resister Pour Exister ; Odile FOURNIER, AU68; Georges GUNTHER, Militant associatif à St Etienne ; Marie Dominique CROQUETTE, collectif Roms ; Youcef KHEFFACHE, Agronome; Dominique GUIVARC’H, EELV ; Gus MASSIAH, économiste altermondialiste ; Philippe AUDEGOND, France Insoumise Arras centre ; Dominique ORSUCCI , conseillère municipale Talasani; Nathalie CLAINQUART-HORNGREN, médecin ; Roseline PAUGOIS, anc. Présidente de la Mission populaire de Trappes ; Jean-Yves PINEAU, directeur des Localos ; Colette SPIRE, retraitée CNRS, CGT ; Guy VALETTE, MFRB , etc.

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